Description
Roland Giguère est le seul créateur lauréat de deux Prix du Québec. Et, qui plus est, l’année même où il obtenait le prix Paul-Émile-Borduas, il était finaliste au prix Athanase-David (qui lui reviendra en 1999). C’est que, chez cet ami d’Albert Dumouchel, il y a toujours eu interpénétration des deux modes d’expression que sont le verbal et le non-verbal, « un continuel va-et-vient, comme l’écrit François Charron, entre l’étrangeté de la langue et la magie du dessin ». Manifestement, Giguère peint comme il écrit ; et vice versa…
Son activité littéraire est antérieure à son activité picturale, et Giguère convient que celle-ci est tributaire de celle-là. Il n’a jamais caché son indifférence devant « une certaine peinture rétinienne » : « Ce qui m’intéresse dans la peinture, c’est ce qu’elle peut suggérer, ce qu’elle peut dire et non ce qu’elle peut montrer. » Il est significatif que la transposition de ses conceptions littéraires en conceptions picturales se soit faite très lentement au fil des années, les petits dessins qui enluminaient les cahiers de poèmes devenant peu à peu des compositions graphiques et chromatiques, où la poésie ne subsistait littéralement que dans les titres. De là aussi le fait que l’évolution de ces deux modes d’expression chez Giguère suive des voies différentes : les poèmes publiés après 1965 dénotent une épuration certaine de l’écriture, tandis que les encres manifestent de plus en plus un foisonnement inédit des formes et des couleurs ; comme si le peintre, plus que le poète, était encore en période d’exploration de son langage…
Roland Giguère – qui situe sa vraie naissance vers l’âge de 17 ans, au moment où il découvre Éluard – n’expose pour la première fois, à la galerie L’Actuelle, qu’en 1955 et, en 1966, le tout nouveau Musée d’art contemporain de Montréal consacre une exposition importante à ses toiles de la série Pouvoir du noir, le meilleur cru de l’artiste aux yeux des puristes.
Comme son ami Léon Bellefleur, Roland Giguère fait de longs séjours à Paris, à partir de 1954, au cours desquels il rencontre André Breton ; il participe également aux activités du Mouvement surréaliste et, surtout, à celles du groupe Phases, un rejeton du cercle de Breton, mais plus international et moins doctrinaire.
Source du texte : http://www.prixduquebec.gouv.qc.ca